My armenia et un taboulé d'herbes comme au Cilicia



Ecrit et réalisé par Very Easy Kitchen


                Monastère de Tatev





Voilà les vacances finies, vacances riches en découvertes d’un pays totalement méconnu. Nous connaissons bien sûr tous des arméniens issus de la diaspora mais demandez autour de vous de placer l’Arménie sur une carte... peu de personnes sauront la placer correctement dans le Sud Caucase. Malgré une grosse amputation de son territoire, c’est un pays riche d’une histoire oubliée et pourtant passionnante. Fier d’être le premier pays chrétien, fier de ses savants, de son écriture et des ses monastères médiévaux, nostalgique d’un empire qui fut envahi, occupé, partagé au prix d’un génocide, avant de s’endormir sous le joug soviétique pendant 70 ans. Aujourd’hui, durement soumise au double blocus turque à l’Ouest et azeris à l’Est, elle renait doucement. Membre du Conseil de l’Europe, elle occupe une position stratégique entre l’Iran et la Russie et partage les valeurs communes de démocratie et de droits de l’homme.


Déclarations internationales et loi française sur la reconnaissance du génocide arménien

L’Arménie est donc passionnante car elle mêle un héritage médiéval important en étant au carrefour de la Perse et de la Méditerranée. On peut aussi bien visiter des monastères antérieurs à nos église romanes que des restes de caravansérails rappelant qu’elle se trouvait sur l’une des routes de la Soie, ou se contenter de regarder les montagnes de cette petite "suisse" caucasienne.





Cimetière de Noradous dont les plus anciennes pierres khatchkars datent de l'an 800.


Observatoire de Zorats Karer, datant du megalithique (équivalent à Carnac ou Stonehenge)

Faisant partie du Caucase, de hautes montagnes dont le Mont Ararat (5 137 m) symbole biblique et nationaliste des arméniens, paradoxalement situé en terre turque (que l’on appelle Arménie historique), elle est un pays de volcans et de terribles tremblements de terre. Si l’on considère que la rivière Araxe délimitant la Turquie et l’Arménie est la frontière naturelle entre l’Europe et l’Asie, alors Ararat serait le plus haut sommet d’Europe, devant le Mont-Blanc. Les iraniens voisins qui viennent nombreux faire du tourisme en Arménie, la considèrent comme une petite Europe.


Lac Sevan, 1/5 de la superficie du pays, 15°C au mois d'août car il est à 2000 m d'altitude mais poumon vert pour les arméniens.

Mais pour nous Européens de l’Ouest nous voyons aussi malheureusement les douloureux restes des soviets : usines à l’abandon, HLM vétustes, tuyaux de gaz apparents, antiques Lada et Volga cotoyant des 4x4 luxueux, personnes âgées démunies, voiries défoncées par le gel, jardins publics figés dans un autre temps... partout ce même constat de délaissement dans les pays satellites que j’ai pu visiter en Asie Centrale.


Fort d'Amber, Eglise Sainte Mère de Dieu, à 2000 m d'altitude au milieu des alpages


Mais l’Arménie est surtout un pays de cocagne, un pays de vergers d’où proviennent nos cerisiers et autres abricotiers que l’on appelait Prune d’Arménie. Le mythe de l’Arche de Noé échouée sur le mont Ararat (de nombreuses enquêtes passionnantes sont à lire sur ce sujet) est toujours vivace et le jardin où la vie aurait reprise, se trouve à ses pieds en Arménie.


Mont Ararat caché dans les brumes d'un orage, seul le petit Ararat à gauche est visible





Le pays croule littéralement sous les arbres fruitiers, les grenadiers (fruit symbole de l'Arménie mais qui murit en septembre) les noyers et églantiers et les marchés regorgent de fruits plus beaux les uns des autres : fruits rouges, muriers, fraises des bois, prunes, pommes, cerises, griottes, pêches et abricots en juin. Toute l’agriculture est bio, les hivers très rudes détruisant toute vermine. Les fruits sont transformés en fruits secs ou confits sublimes comme dans toute l'Asie Centrale.








Les montagnes sont couvertes de fleurs et les abeilles sont reines. On y déguste donc une cuisine fraîche, influencée par la Perse et la Méditerranée: tous les plats sont présentés en même temps sur la table : salade de tomates et concombres, tabuleh, muttaball (caviar d’aubergine), houmous, dolmas (feuilles de vignes ou de chou farcies), brochettes de viandes et pommes de terre (Khorovadz), etc. Et toujours des herbes fraiches, du yaourt, de la crème double ou de la crème aigre, divers fromages proches de la féta. On mange aussi des céréales comme le boulghour, le sarrasin et le riz pilaf servi avec des fruits secs à la mode persanne. Ou des mantis, sortes de raviolis que l’on avait découvert en Ouzbekistan.









 




Bien sûr au marché d'Erevan vous trouverez toutes les épices de l'Orient.











J'aime l'ironie de cette photo: la machine à moudre le café s'appelle Georges...



Les hivers sont durs et la soupe khashlama, mélange de pomme de terre et boeuf, parfumée avec de l’aneth est un vrai réconfort (nous y avons gouté par 35°C).


Le pain arménien Lavash accompagne tous les plats. Je l’ai trouvé délicieux sortant du four, un peu moins bon après plusieurs jours (il se conserve deux mois si les fines feuilles de pain sont régulièrement humectées avec de l’eau). Les arméniens aiment aussi la viande séchée et les saucissons de boeufs secs et parfumés.



L’eau du robinet est potable mais sinon bière et vin arméniens méritent d’être essayés même si les standards vinicoles ne sont pas encore les nôtres. Nous avons gouté à la truite Ichkhan du lac Sevan et aussi à de l’esturgeon grillé terriblement fondant. Enfin les délicieuses pizzas arméniennes Lahmajoun sont inévitables pour un repas sur le pouce, arrosées de tan, boisson d’origine persane à base de yaourt liquéfié et parfois gazeux.





A moins que vous ne préfériez la vodka, héritage russe, même si les arméniens semblent beaucoup plus sages avec l’alcool que les russes. Tout le pays est d’ailleurs très calme. Les arméniens sont chaleureux, paisibles et aimables, un brin indolents sous la chaleur écrasante du mois de juin. Erevan est l’une des villes les plus sûres au monde et les terrasses sont pleines à la mode espagnole.



Petit déjeuner à Goris



Le fromage, omniprésent sur toutes les tables arméniennes.


Pour le dessert, ce sont souvent les délicieux fruits qui sont proposés mais baklavas et brioche à la pâte de noix nous ont aussi été servis. Les confitures sont très présentes notamment la confiture de rose ou de grenade. Les arméniens sont plutôt sveltes car ils consomment beaucoup de légumes et fruits. McDo, Starbucks, KFC ne se sont pas encore implantés en Arménie... Mais les yeux des arméniennes sont fixées vers l'idole américaine : Kim Kardashian, même si l'on reconnait sa vulgarité bling bling, elle est un modèle de beauté pour les filles d'Erevan.








Nous avons mangé de délicieux taboulés tous différents les uns des autres mais notre coup de coeur a été pour celui du restaurant Le Cilicia. Un taboulé d’herbes frais et citronné, délicieux avec des brochettes dont j’ai librement imaginé la recette.




Taboulé d’herbes comme au Cilicia
pour 4 personnes
1 bouquet de persil plat
1 bouquet de coriandre
1 bouquet de menthe
2 gros citrons jaunes
1 cuillère à thé de sumac
2 petits concombres avec peu de pépins
2 tiges d’oignons frais
150 g de boulghour
300 g d’eau chaude
2 tomates bien mûres
sel et poivre
huile d’olive ou huile d’arachide


Rincez le boulghour à l’eau froide. Placez le dans un saladier et versez de l’eau chaude afin de le couvrir d’environ 1 bon centimètre. Ajoutez 1jus de citron. Laissez le gonfler pendant 1h30, le grain doit rester ferme. Attention le grain de boulghour ne doit pas cuire.


Equeutez les herbes, et hachez les. Placez les dans un saladier. Hachez la moitié de la menthe et versez la dans le saladier avec les tiges d’oignons finement émincées.
Coupez le concombre en petits cubes. Coupez la tomate en petits cubes et ne conservant que la partie ferme et sans pépin. Mélangez concombre et tomates aux herbes. Assaisonnez avec peu de sel, poivre, le jus du second citron et 4 cuillères d’huile d’olive.
Une fois que le boulghour a absorbé l’eau, essorez le avec les mains afin de le rendre le plus sec possible. Mélangez le aux herbes. Saupoudrez de sumac et servez bien frais (le sumac légèrement citronné apporte un côté piquant pétillant très agréable).




Je ne sais pas si je vous ai donné envie de visiter ce pays mais si un jour vous êtes invités à dîner chez des arméniens, vous comprendrez un peu plus leur culture et leur histoire.
Un grand merci aussi à Tigran et à Astghik, qui nous ont guidés à travers leur pays.

Manger Arménien à Paris : La Cantine de la Maison de la culture arménienne - Elle se cache au fond d'une jolie cour du IXe mais il n'y a pas besoin de sésame pour venir y déjeuner. L'accueil est chaleureux, la cuisine familiale, les tables occupées par des habitués - souvent membres d'associations arméniennes - qui s'y retrouvent. Plat du jour (aubergines farcies ou brochettes de poulet, 8 €), petit croissant fourré en dessert, c'est bon enfant et plein de gentillesse, dans un cadre de salle à manger vieillotte, aménagée en réfectoire pour grands. 17, rue Bleue, IXe.Tél. : 01 48 24 63 89 (le Figaro).





Commentaires

Karine D. a dit…
Magnifique ces photos :-) !!! Il est super leur marché !!!!
Un très beau taboulé bien appétissant !
Bis
Brin de cuisine a dit…
oh, quelles belles photos de voyage, merci de les partager ... quant au taboulé, il est très tentant.
très belles photos, elle nous font rêver... surtout le taboulé :)
stéphanie
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Laure a dit…
Les photos sont superbes,beaucoup de couleurs j'adore ! et tout ce fromage...
Epicurieuse a dit…
Merci pour ce superbe reportage photo, qui m'a d'autant plus intéressée que ce pays m'est totalement inconnu, bien que j'ai des origines arméniennes!
cuisinetcigares a dit…
Bonjour,

J’ai été taguée pour la 1ère fois par Venzecia du blog « Un Amour de Recettes » et c’est avec un grand plaisir que je te tague à ton tour. N’hésite donc pas à te rendre sur le blog Cuisine et Cigares pour découvrir l’article :

http://www.cuisinetcigares.com/article-madame-cuisine-taguee-par-venzecia-du-blog-un-amour-de-recettes-107810258.html

Amicalement, Madame "Cuisine"
Bravo pour les articles et surtout pour toutes ces magnifiques photos.
Un blog très réussi ... à tout point de vue.
Nadji a dit…
Magnifique billet. Ça donne envie d'y aller et tout de suite.
J'ai presque tout pour faire ce taboulé. Tu n'as pas ramené de recettes de gâteaux? Ils en font de délicieux.
Merci pour basilique/basilic; pire dans l'intro, je parlais de balsamique. Grâce à toi, j'ai pu tout corriger.
A bientôt
helene06 a dit…
tes photos sont justes sublimes
Mijo a dit…
Merci de nous avoir partagé ce voyage qui sort vraiment de l'ordinaire.
nat@cha a dit…
merci pour cette fabuleuse invitation au voyage d'une contrée peu connue
et ton taboulé plein de verdure est sublime !
Beah a dit…
Merci pour cet aperçu complet d'un pays effectivement méconnu de la plupart d'entre nous (et très loin pour nous). Moi qui me trouve dans un pays où il n'y a quasiment pas d'arbres fruitiers, je bave littéralement devant toutes ces variétés et ces couleurs.
Unknown a dit…
Tu m'as donné envie de sauter dans un avion et oublier la Corse , je n'ai jamais réussie a y aller mais je vais faire de mon mieux , si tu as des adresses de gites ou autre nous sommes preneurs ! merveilleux reportage !
Garance
Merci pour ton com sur mon blog, c'est pas le Naked Chef qui va nous apprendre tout çà! ;-)

Tu m'as simplement provoqué un gros coup de blues de la Méditerranée. J'ai vécu 10 ans à Marseille où la communauté arménienne est très importante.

Pour préparer un mezzé libanais j'avais l'habitude d'aller dans une épicerie arméno-libanaise où je trouvais tout ce qu'il me fallait. Ta recette de taboulé avec une proportion supérieure d'herbes fraîches est proche de la version traditionnelle libanaise, 85 % de persil plat et menthe + boulghour + crudités, tout à l'opposé du taboulé pied-noir avec d'abord de la semoule.

C'est très symbolique de la culture arménienne, aux croisements de plusieurs civilisations, que le boulghour, le riz et le blé soient au centre de la cuisine que tu as présentée. La cuisine d'un pays, d'une région, d'une communauté est toujours le reflet de son histoire, elle peut être le témoin d'enrichissement mutuel ou le signe d'un profond rejet d'une autre culture.

J'ai beaucoup aimé ton reportage, sacré boulot de doc et de rédaction! Superbes illustrations aussi : ça aide à voyager!

Besoooooos
CARDAMOME a dit…
tu m'as vraiment donné envie d'y aller car j'aime tout ce qui est meaddle east. je fais le taboulé quasiment comme ça mais je ne mets pas d'eau, que le citron et laisse mariner toute la nuit (boulghour fin)
c'est un régal, bien meilleur que celui qui est fait en france; on en a encore fini un hier
je note ton lien dnas mes docs car vraiment envie de découvrir cette région; merci pour le reportage
Merci pour cette découverte d'un pays il est vrai mal connu, les photos sont très belles, et quelle profusion de fruits et de légumes ! Cela donne envie de découvrir l'Arménie :)
Sweet Faery a dit…
Tes photos sont sublimes. Merci pour ce reportage-découverte !
Cela me semble un bien joli pays que je ne connais pas du tout. Merci pour le voyage !
les photos de marché je crois que c'est ce que je préfère dans un voyage
Isabelle a dit…
C'est époustouflant les photos de ce pays que je ne connais guère. C'est magnifique, et la cuisine a l'air délicieuse.
J'ai adoré la photo avec la vieille balance !
La tarte aux dragées plus haut , était une parfaite réussite, je suppose qu'elle était bonne !
soleil18 a dit…
les photos de ton voyage sont superbes magnifiques, celle que j'ai préférée est celle avec des seaux remplies de framboises et aussi celle au début avec des montagnes où on croierait qu'on les a saupoudrer de paprika !! très beau ton taboulé !!